Jeudi 12 Novembre 2015
Lieu : Salle des thèses, rue Chifflet à Besançon.
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MUSICOTHERAPIE ET PERINATALITE
Pour une « observation
sensorielle » des « formes
sensorisonores » à partager
Prévention des failles narcissiques identitaires précoces
Christelle VIODÉ –BÉNONY
Psychologue
clinicienne – Psychanalyste – Maître de Conférences à l’Université de
Bourgogne, Dijon (LPPM, 4452)
Nos expériences cliniques
plurielles dans le champ périnatal nous amènent à insister sur l’incontournable
nécessité d’une « observation sensorielle
et enactante » du côté de l’analyste de l’expressivité sensorielle,
sonore du bébé et/ou du jeune enfant en devenir adulte et ce, en lien avec nos
tous premiers travaux sur les langages verbal et infraverbal de bébés
confrontés à des situations extrêmes où d’emblée nous avons mis l’accent sur
l’essence même de l’ancrage sensoriel dans l’accès à l’intersubjectivité. La
voix, les sons, les cris, les pleurs entre autres font partie de la musique du
langage et le bébé se les approprie très tôt pour « toucher » et même « percuter »
l’adulte donneur de soin. C’est une des raisons pour lesquelles l’analyste favorise
l’accès à un « espace commun de
jeu et de liberté » - véritable espace transitionnel et lieu de
transformation - afin d’accueillir
« ces bruits », sous tendus
par une violence vécue par le bébé aux prises avec « ses cacophonies internes », « son anarchie
sonore » reflet bien sûr d’un véritable chaos interne. Dans son « corps à corps » avec le
sujet, l’analyste permet l’existence de cette « cordée musicale » sur laquelle l’enfant va s’accrocher,
s’agripper, s’appuyer, s’y attaquer même pour tester la résistance de ce lien à
sa propre destructivité pour que puissent émerger dans cette rencontre ces
résonnances communes, véritables supports à la différenciation, aux
dialectiques des couples dedans/dehors, et présence/absence de l’objet. Nous
pouvons donc aisément envisager la musicothérapie comme un véritable média à
condition aussi que le thérapeute accepte d’être ce médium malléable pour
soutenir le sujet en difficulté ou en impossibilité d’expression de sa
souffrance. Celui-ci pourra alors exprimer et vivre avec un autre ses affects,
pour sortir quand cela est possible d’un état de stupeur, de détresse ou encore
de solitude et rencontrer enfin un objet « secourable »
à un moment nécessaire à sa vie psychique qui puisse conférer à la pulsion sa juste et efficace valeur messagère.
Lui offrir une « portée et une
cordée musicales » qui lui permettent : l’accès à ses propres résonances
internes devenues dès lors supportables, harmonieuses ; l’accès à sa
propre snsualité, à ses autoérotismes et au plaisir ; l’accès à sa propre
réflexivité puisque la pensée pour devenir appropriable doit passer par les
sens, par les sons. Freud et avant lui Aristote, n’énonçait-il pas déjà que «
Rien ne peut être dans la pensée qui ne soit avant dans les sens ».
Ainsi, par cet accordage
naissant, et l’expressivité des formes « sensorisonores trouvées-crées »
en lien avec la vie fœtale, il est possible d’espérer favoriser l’émergence
d’une « musicalité symbolisante et
subjectivante » du côté du jeune enfant aux prises avec ses souffrances
narcissiques et identitaires pour que ses processus de pensée en risque
d’entrave par ses traumatismes précoces non seulement ne se figent pas mais
pour qu’ils puissent soutenir toute l’activité narrative à venir du sujet à soi
et aux autres, pour que d’autres situations apparentées ne réveillent pas ces
situations premières traumatiques avec leur impact encore désorganisateur.